Les enquêteurs du domaine des transports aériens ont mis en évidence un mécanisme psychologique appelé tunnel cognitif pour expliquer des accidents qui paraissent incompréhensibles. Des pilotes chevronnés, entraînés à gérer des situations stressantes adoptent soudain un comportement aberrant. Ils n’entendent plus les alarmes dans le cockpit, ne voient plus les instruments qui leur indiquent que l’avion est en danger. Ils accentuent encore et encore l’action qui les met, ainsi que leurs passagers, en danger. Pourquoi ? Parce qu’ils sont focalisés sur un seul instrument de leur tableau de bord. Leur cerveau élimine, sans qu’ils en aient conscience, toutes les données qui pourraient remettre en question leurs actions et leur raisonnement.
Nos autorités politiques et scientifiques souffrent du même syndrome dans la gestion du COVID. Obnubilées par le décompte journalier des contaminations, elles sont totalement focalisées sur un indicateur très partiel et insuffisant de la situation. A l’instar du pilote qui réduit encore la vitesse de son avion alors que celui-ci est au bord du décrochage, nos autorités persistent avec les mêmes mesures depuis près d’une année. L’arrivée de la deuxième vague puis de la troisième n’ébranle pas leurs certitudes, les opinions divergentes sont ignorées. L’impact des mesures sur la santé mentale et physique des populations, les conséquences économiques à moyen et long terme, la dette colossale que les générations futures vont devoir éponger, sont traités comme des épiphénomènes. Une seule chose compte, faire baisser le décompte journalier. Jusqu’à l’absurde.
Nous devons sortir de cette transe collective et changer de perspective. Rétablir un dialogue intégrant les différents points de vue et intérêts, cesser d’utiliser l’argument de l’urgence pour mettre à mal la démocratie et justifier l’autocratie. Avant que les dégâts humains, sociaux, culturels, politiques et économiques ne soient irréparables.