Quel rapport entre le développement des voitures autonomes et d’algorithmes pour recruter sans intervention humaine ?

Dans les deux cas, les promoteurs de ces nouvelles technologies fondent leur raisonnement et leur action sur l’axiome suivant : la machine étant plus fiable que l’humain, il faut éliminer au maximum la marge de manœuvre de ce dernier pour améliorer notre sécurité et notre succès.

Caricatural ? Malheureusement pas, en voici quelques exemples :

Dans une interview récente, le Directeur de l’Office Fédéral des Routes (Ofrou) déclare que les voitures intelligentes rouleront de manière plus sûre, et que la sécurité s’en trouvera renforcée. Il dit également qu’elles permettront d’optimiser les voies de transport actuelles, donc de ne pas en construire de nouvelles.

Le National Bureau of Economic Research a conduit une étude qui tente de démontrer avec une méthodologie expérimentale discutable, que les collaborateurs engagés au travers de test restent plus longtemps dans leur job que ceux engagés par les managers.

Un article de la Society for Human Resources Management présente les arguments en faveur de l’utilisation des algorithmes. Principalement, le gain de temps et l’accès à des candidatures qui ne seraient pas retenues dans un processus classique. Laisser les machines faire le sourcing permettrait également aux recruteurs de se concentrer sur l’établissement de la relation et l’intégration dans l’entreprise. Evidemment, mais cela est dit plus discrètement, de diminuer la partie « irrationnelle » de la décision. 

Il y a deux choses qui me fascinent dans ces études et ces raisonnements.

La première est qu’il ne vient pas à l’idée des « spécialistes » que la réponse la plus appropriée à l’augmentation du trafic de données ou de voitures est la formation et le développement des compétences des conducteurs et des recruteurs. Ils ont décidé que l’humain était arrivé à ses limites, et qu’il faut le remplacer par plus performant. Il vaut ainsi mieux investir dans les technologies que dans le développement des personnes.

La seconde est l’oubli permanent (et volontaire) d’un élément clé : les machines sont encore créées par des humains, et un programme informatique si sophistiqué soit il est basé sur des décisions et paramètres choisis à la base par des humains. C’est donc la subjectivité de quelques individus qui remplace celle de tous les autres. Mais également leurs valeurs, leur vision du monde, leur intérêt personnel, leurs limites qui se substituent à celles des autres.

Alors, vaut-il mieux accepter la multiplication des erreurs individuelles, ou se réfugier derrière des systèmes qui font peut-être moins d’erreurs, mais des erreurs qui impactent en une fois des milliers de personnes ?

Mon choix est clair : je préfère faire confiance à mes semblables qu’à une machine, aussi sophistiquée soit-elle.